La maison poulain
Quel sens donner à cet article? En quoi est-il intéressant ? En quoi attire t il mon attention ? Introduction à « l’Urbex«
Après « maison de rêve« , mon binôme me propose d’aller visiter un foyer abandonné, lui qui aime l’Urbex, fasciné par les vieilles choses, lui qui s’extasie devant un « Jour de France » ou un autre « Paris Match » de 1954. Il me dit que dans ces maisons le temps est suspendu, c’est vrai. On pourrait tout à fait imaginer madame en train de ranger ses bobines dans ses boîtes en fer. Ces boîtes dans lesquelles notre grand-mère rangeait jadis les gâteaux secs qui finissaient par avoir un goût de moisi dégueu, des gâteaux mous où on pouvait lire des « pour un rendez-vous », « à demain » ou encore « je vous aime ». Ces gâteaux que seul le chien adorait en réalité. Hé bien des boites comme celle-là, la maison en est remplie, toute boîte est une opportunité au rangement, mais pas seulement, des boîtes de chocolat poulain, à chaque étage, dans chaque pièce, le chocolat poulain occupe l’espace - forcément, « depuis 1848 ». C’est un peu la demeure des boites en fer, du chocolat poulain et des plats en pyrex. Va savoir pourquoi.
Entrer dans cette maison, c’est poser un pied après l’autre, pas à pas, chuchoter, observer sans déranger. C’est, surprenant. Effectivement le temps est arrêté et, aussi excitant qu’inquiétant, on découvre, des chaussures, de vieilles chaussures, des outils rongées par la rouille, des journaux d’un autre temps, des amas de choses indéfinissables, des cahiers de brouillon, des médicaments ou plutôt des remèdes, avec des slogans commerciaux prometteurs « spécialement », « véritable », des verres comme ceux de la cantine qui traversent les époques, ceux qui indiquent notre âge. Cette maison a été pillée de nombreuses fois, retournée, saccagée, éventrée, vidée.
Le rez-de-chaussée présente une pièce sordide, angoissante, impressionnante ; un manteau est encore posé sur ce dossier de chaise, la table est recouverte d’une nappe en vichy rouge et blanche, la même que chez mamie, encore une fois, les araignées campées dans les angles depuis bien longtemps, les rideaux usés par le temps, en lambeaux, et des boîtes de chocolat poulain… On pourrait imaginer qu’un vieil homme à l’abandon pourrait revenir à tout moment. Le col en fourrure de ce manteau limé par le temps, l’usure du temps.
Ici tout est vieux, vraiment vieux.
Un escalier nous invite à accéder à l’étage. Mon binôme m’encourage à monter avec lui pour le découvrir ensemble. Mon imagination débordante rend la situation inquiétante, j’ai vraiment la trouille, je ne lâche plus sa main, même si ça ne sert à rien. C’est drôle d’ailleurs ce comportement très enfantin de prendre la main d’autrui, comme si cela pouvait éviter le danger… Je souris à cette pensée de fausse rassurance et envisage l’idée, la notion d’accompagnement. Bref, à l’étage, aucun macchabée, ni desséché, ni momifié. Je peux de nouveau respirer. En haut, c’est pareil, un désordre sans nom, mais des lits en plus, des matelas retournés, des pyrex, des boîtes en fer et… des boîtes de chocolat poulain.
La toiture menace de s’écrouler, le promoteur a oublié l’idée de vente et sa pancarte disparaît lentement sous le regard de Dame Nature. Nous quittons les lieux, un magnifique poêle est esseulé dans le passage, surement que ses voleurs ont été surpris… Il ne reste plus grand-chose au milieu de boîtes en fer et de boîtes de chocolat poulain.
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